Palaiseau, le 12/10/1999


Monsieur le Premier Ministre,


Je m'étais permis d'écrire à Monsieur le Président de la République le 22/07/1997 au sujet de ce qui est aujourd'hui connu comme le bug de l'an 2000.

A quelques semaines de l'obstacle majeur, il n'est pratiquement plus temps de sensibiliser ceux qui n'auraient pas encore pris la mesure du problème. Depuis plusieurs mois, un effort d'information important (auquel j'ai participé bénévolement : articles de journaux, livre, émissions de radio et de télévision, conférences,...) a été accompli tandis qu'une grande partie des corrections et des vérifications nécessaires ont été effectuées.

Aujourd'hui, deux catégories très différentes de conséquences sont à prevoir : d'une part, des dysfonctionnements qui seront très certainement de faible ampleur. D'autre part, des réactions incontrôlées de nos concitoyens face à des peurs imaginaires et "millénaristes", comme cela peut déjà se voir dans d'autres pays. C'est, à mon avis, là que résident les risques les plus grands : il n'est qu'à se rappeler les assauts menés contre quelques bureaux de poste français, lorsque, au début de l'année 1999, le système informatique de gestion des comptes d'épargne de la poste fut indisponible pendant quelques heures. Il est évident que des retraits massifs d'argent liquide ou la constitution de stocks excessifs (eau, sucre, farine, essence,...) pourraient provoquer rapidement des pénuries artificielles, alors qu'aucun problème matériel lié au bug de l'an 2000 ne les auraient déclenchées.

Face à cela, il est nécessaire de responsabiliser et de rassurer nos concitoyens, puisque de leur attitude dépendra en grande partie le succès ou l'échec de ces opérations. Cette action ne peut être conduite qu'aux plus hauts niveaux de l'Etat.


Je vous prie de croire, Monsieur le Premier Ministre, à l'assurance de ma très haute considération.


Docteur Jean-François COLONNA

Chercheur au CMAP de l'Ecole Polytechnique